mercredi 20 octobre 2010

La guerre des taux de change, un bras de fer économique

La guerre des taux de change, un bras de fer économique
Certains pays utilisent le protectionnisme monétaire pour amortir les conséquences de la crise économique.
Certains pays utilisent le protectionnisme monétaire pour amortir les conséquences de la crise économique.
Reuters/Bobby Yip
Par Altin Lazaj
Après le sommet Europe-Asie, c'est un sommet Union européenne-Chine qui se tient à Bruxelles aujourd'hui, 06 octobre 2010. Et encore une fois la réévaluation du yuan, réclamée par les puissances économiques occidentales, sera au centre des débats.
Hier encore, les principaux responsables économiques européens ont invité fermement Pékin à plus de flexibilité du yuan. Comme les Américains, les dirigeants européens accusent en fait la Chine de pratiquer le dumping monétaire, c'est-à-dire de sous-évaluer sa monnaie pour favoriser ses exportations. Mais les demandes des Occidentaux sont restées jusqu'à présent lettre morte. Et la Chine a de bonnes raisons pour ne pas réévaluer sa monnaie. Car en sous-évaluant le yuan face au dollar et à l’euro, le prix des produis chinois baissent. Sa croissance repose essentiellement sur les exportations et non sur la consommation intérieure qui est une stratégie à long terme pour le gouvernement chinois.
D’autres pays sous-évaluent leur monnaie
Pour amortir les conséquences de la crise économique, certains pays préfèrent laisser filer leurs monnaies, donc utiliser le protectionnisme monétaire, plus efficace que le protectionnisme commercial. Ce dernier est très difficile à appliquer parce qu’il implique une augmentation des droits de douane.
Par exemple, en un mois, le dollar américain a perdu environ 8% de sa valeur par rapport à l’euro et cette baisse semble continuer. Le Japon et le Brésil souhaitent aussi endiguer la vigueur de leurs monnaies face à l’euro et au dollar. Ainsi Tokyo est intervenu pour tenter de faire baisser le yen qui était à son plus haut depuis 15 ans face au dollar et le Brésil a annoncé cette semaine le doublement de la fiscalité sur les placements obligataires des investisseurs étrangers pour tenter d'enrayer la hausse du réal. Tandis que ce mercredi 6 octobre les autorités sud-coréennes ont acheté du dollar pour freiner la hausse du won. D’où, la crainte grandissante dans le monde d’une « guerre des changes ».
Si la sous-évaluation de la monnaie peut soutenir la croissance d’un pays à court terme, à long terme elle ne pourra pas remplacer une stratégie de relance globale de la croissance, prévient Agnès Benassy-Quéré, directrice du CPEII, centre français d'études et de recherche en économie internationale. Pour elle, « la sous-évaluation est un jeu à somme nulle. Tous ce qui est gagné par un pays est perdu par l’autre, donc c’est une stratégie non coopérative qui ne peut pas durer longtemps » souligne-t-elle.
Et dans cette guerre de devises l’euro gagne en vigueur alors même que l'Union monétaire traverse une grave crise de confiance suite aux problèmes de la Grèce et à présent de l'Irlande. La Banque centrale européenne refuse de jouer le même jeu que les autres pays qui utilisent le protectionnisme monétaire. Conséquence : l’industrie européenne est pénalisée. Exemple : la faiblesse du dollar face à l’euro a coûté 3 milliards d’euros lors des trois dernières années au groupe EADS, le leader de l’aéronautique européen.
L’impuissance des institutions internationales
Le dossier monétaire devrait dominer les discutions au sein du FMI, à partir du 7 octobre  à Washington, puis les discutions informelles du G20 et du G7, vendredi 8 octobre. Mais ces réunions risquent d’être vaines d’après Agnès Benassy-Quéré. « L’expérience montre que depuis 1973, date de la généralisation des changes flottants, la coordination de taux de change est assez mitigée. Il est très rare que les gouvernements réussissent à s’entendre sur des évolutions de taux de change » ajoute-t-elle.
Car il sera très difficile dans ces réunions de mettre d'accord les trois principaux groupes concernés avec des particularités économiques différentes : les Etats-Unis et les grands pays consommateurs, les grands pays exportateurs (Allemagne, Chine et Japon) et les pays exportateurs en développement.

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